Un café avec Marjorie Gosselin


Notre billet mensuel « Un café avec » permet à la CDC de mettre ses membres en valeur par le biais de témoignages inspirants. Aujourd’hui, on vous présente Marjorie Gosselin, directrice de l’AQEPA Estrie. Bonne lecture!

 

Pour se rendre à l’Association du Québec pour enfant avec problèmes auditifs Estrie (AQEPA Estrie), il y a une sonnette à l’entrée du corridor. Et pas n’importe laquelle ! Une de celles qui envoient un message lumineux dans les bureaux de l’organisme pour signaler sa présence. C’est ainsi que la CDC s’est annoncée pour une petite visite dans l’univers de l’AQEPA. Ce fut l’occasion de rencontrer de Marjorie Gosselin, directrice de l’AQEPA.

Marjorie Gosselin

Présent à travers tout le Québec, cet organisme a pour mission de favoriser et de promouvoir l’inclusion sociale des jeunes vivant avec une surdité. Il reçoit beaucoup de demandes de soutien des familles, car l’aide pour communiquer demeure un besoin fondamental. Depuis plusieurs années, un énorme travail de déconstruction des préjugés a été entrepris par l’AQEPA dans le but de sensibiliser la population aux réalités des jeunes vivant avec une surdité, et ainsi rendre notre société plus inclusive. L’AQEPA Estrie propose également des activités aux deux semaines, permettant aux jeunes de se voir entre eux et donc, de se sentir moins seuls.

 

Le défi de communiquer

Les personnes sourdes apprécient les efforts des entendants pour communiquer avec eux. Cependant, on peut dire que le port du masque n’a pas facilité les choses. « Avec la pandémie, la communication a été un vrai défi ! À cause des masques, on a dû revenir à la base. Depuis leur retrait, la frustration diminue de plus en plus », constate Marjorie Gosselin. Selon elle, le plus gros défi reste d’être en position de minorité dans la communauté entendante.

 

Langues des signes et interprètes

« L-S-Q, c’est ma langue », dit Marjorie.

Heureusement pour les personnes sourdes, communiquer peut se faire par signes. Marjorie précise que chaque pays a sa langue des signes. Au Canada, la communauté sourde francophone utilise la langue des signes québécoise (LSQ), qui est différente de celles des États-Unis ou de la France par exemple. Par contre, certains mots se ressemblent, donc les personnes sourdes peuvent les comprendre.

« Je suis sourde profonde et ma mère s’en est rendu compte dès mes trois mois. En grandissant, elle a tenté d’oraliser afin de favoriser la lecture sur les lèvres, mais ça ne marchait pas, alors elle a fini par apprendre la LSQ. Jusqu’à ma 2e année, je n’ai pas eu d’interprète. Quand j’ai changé d’école, j’ai pu bénéficier de ce service jusqu’à l’université, ce qui m’a permis d’en apprendre beaucoup. »

 

Étudier et travailler avec la surdité

Marjorie a dû développer plusieurs stratégies au fil des ans pour combler le manque d’accès à l’information lié à sa condition. C’est là un défi important à surmonter pour les jeunes et leurs familles. Marjorie représente un bel exemple à suivre pour de jeunes malentendants puisque ce défi ne l’a pas empêchée de poursuivre sa scolarité jusqu’à l’université. Elle a un baccalauréat en adaptation scolaire et sociale, un certificat en psychologie et un autre en arts visuels.

« On peut choisir n’importe quel emploi, dit-elle. Il se peut que cela nécessite des ajustements ou un interprète, mais c’est possible. » 

 

Découverte de bruits inconnus

En 2018, Marjorie a pris la décision de se faire installer un implant cochléaire en complément de l’appareil auditif qu’elle porte depuis toujours. « Mon appareil auditif m’aide à percevoir les sons plus graves. L’implant, qui est plus précis, m’a permis de découvrir de nombreux bruits, comme les tic-tac de l’horloge ou le bruit des pas dans la neige. Je ne savais pas que ces choses faisaient du bruit ! »

 

Quelques préjugés à éliminer

Les personnes sourdes et malentendantes rencontrent encore des préjugés dans notre société, déplore Marjorie. En voici trois :

  • Les sourds ne peuvent pas conduire. C’est faux, les sourds compensent en regardant le comportement des autres et en se servant davantage des miroirs.
  • Les sourds ne peuvent pas téléphoner. Oui, ils le peuvent ! D’ailleurs, l’arrivée du cellulaire a permis de faciliter la communication, avec des outils comme les textos, courriels, appels vidéo… ou encore le service relais vidéo (SRV) avec un interprète, qui existe depuis 2017.
  • Les sourds sont muets. Les sourds ne sont pas muets ! Ils ont de la voix, parlent et s’expriment oralement et si ce n’est pas le cas, c’est par choix. Le mutisme est très rare. C’est mal perçu par la communauté des personnes sourdes et malentendantes d’être qualifié de sourd et muet et cela mérite qu’on le nomme. 

 

Des trucs pour communiquer avec une personne malentendante

L’AQEPA diffuse diverses stratégies de communication. En voici quelques-unes parmi d’autres que Marjorie nous a partagées. Espérons que la lecture de ces quelques lignes vous aura donné envie de les pratiquer!

  • Éviter de se placer en contrejour quand on parle à une personne sourde, sinon on ne voit pas la bouche articuler.
  • Taper doucement sur l’épaule pour appeler une personne sourde.
  • Parler normalement, car quand on exagère la prononciation ou que l’on crie, ça change la forme de la bouche, ce qui rend plus difficile la lecture sur les lèvres.
  • Faire des phrases courtes, utiliser des synonymes ou vérifier si la personne a bien compris
  • Éviter de changer de sujet
  • S’assurer qu’on voit bien notre bouche. Malheureusement, une moustache peut cacher le mouvement des lèvres.

 

En savoir plus

https://aqepa.org/
https://www.sourdestrie.com/